« les Coloniaux », d’Aziz Chouaki
Jeu : Hammou Graïa
Réalisation : Jean-Louis Martinelli
Photos Philippe Barailla, Patrice Vatan et JYL
captation vidéo Patrice Vatan
Les coloniaux
Impressions Philippe Barailla
Le récit d’Aziz Chouaki est repris ici par le réalisateur Jean-Louis Martinelli et offre au comédien Hammou Graïa un texte fort et original. L’unique personnage est Mohand Akli, jeune berger berbère insouciant que le destin vient cueillir sous son figuier pour le plonger directement dans l’enfer de Verdun.
La première version de son enrôlement dans l’armée française est plutôt idéalisée : il raconte comment, mollement assoupi sous son arbre tutélaire (« l’ombre est l’or du désert »), il est aimablement visité par Voltaire, Napoléon, Jeanne d’arc, envoyés spéciaux de la nation française pour négocier son engagement : lui seul peut sauver la France de la griffe allemande. Il reconnaît même Jésus Christ portant sa croix, venu en personne l’implorer d’intervenir, pour le cas où la délégation précédente aurait échoué.
Convaincu et flatté comme le corbeau de la fable, Mohand s’envole dans le ciel jusqu’à son héroïque destination.
Bien sûr, la deuxième version est plus prosaïque car réelle : l’officier recruteur le « désigne volontaire » et l’expédie sans ménagement vers la ligne de front où il rejoint les combattants marocains, maliens, sénégalais, etc. pour reprendre le fort de Douaumont.
Réquisitoire naïf mais d’autant plus terrible que ce long monologue… Destin absurde que celui de ces peuples obligés de combattre et de se sacrifier pour délivrer leur occupant de son propre occupant… mais l’idée fera son chemin. Le désir d’indépendance commence à germer quand Mohand, ayant perdu presque tous ses compagnons et de retour à Alger, sent confusément qu’il a changé, et son avenir également.
Hammou Graïa, que le public cosnois à déjà vu sur cette scène en 2021 dans » Née un 17 octobre », offre une prestation remarquable dans ce rôle de témoin réaliste et poétique d’une réalité inimaginable.