Le banquet de la Sainte Cécile

Texte et mise en scène : Jean-Pierre Bodin, François Chattot (création Avignon 1994)
Costume : Alexandrine Brisson
Lumière : Gérard Bonnaud
Conception et réalisation technique : Jean-Baptiste Herry, Jean-Claude Fonkenel, Denis Tisseraud.

Avec la complicité de l’Harmonie de Cosne-sur-Loire

 

Photo Gilles Raimbault, Patrice Vatan et JYL
Vidéo Les Amis du Garage Théâtre

Le banquet de la Ste Cécile

Impressions Philippe Barailla

Quand Jean-Pierre Bodin débarque sur la scène, précédé par quelques notes du saxophone dont il joue lui-même, et qu’on le voit s’installer seul à une longue table de banquet nappée de blanc, on est loin de s’imaginer quelle histoire va se dérouler, et comment elle va finir. L’artiste est attablé face à quelques spectateurs-figurants « privilégiés » avec lesquels il partage le vin, disposition évoquant fortement la cène du Christ avec ses apôtres, mais le parallèle s’arrête là.
Ce one man show, créé par l’auteur en 1994 sur des bases autobiographiques, débute comme une visite guidée des installations municipales, commerciales et touristiques de la commune de Chauvigny (Vienne), avec passage en revue de tous les recoins de la ville, des plus prestigieux aux plus insignifiants. Un brin de chauvinisme assumé n’est pas exclu. C’est là que le petit Jean-Pierre a passé son enfance et qu’il a rencontré les personnages qui peuplent encore aujourd’hui sa mémoire -et son spectacle : en premier lieu, les membres de l’harmonie municipale, galerie de portraits tendres et amusants, parsemée d’anecdotes du quotidien : pas d’événements extraordinaires, mais racontés avec une naïveté quasi-enfantine et un sérieux appliqué qui sont la marque de fabrique du comédien, ingrédients d’un comique subtil et désarmant.
Le talent original de l’artiste suffit à tenir le public en haleine jusqu’au bouquet final, où l’Harmonie de Cosne au grand complet envahit la scène pour un petit concert-surprise haut en couleur. Sainte Cécile a été bien fêtée !

Impressions Patrice Vatan

Evidemment que ça nous parle la Sainte Cécile à nous Cosnois qui, chaque 22 novembre, succombons à l’aubade donnée par l’Harmonie, aussi attendions-nous d’une oreille ferme le banquet éponyme offert par ce gars-là, Jean-Pierre Bodin, d’emblée sympathique vu qu’il régale d’un verre de rouge les spectateurs du premier rang.
Longue et dense plongée dans la France profonde des années cinquante, soixante, le banquet de la Sainte Cécile recrée la vie sociale d’une petite ville vue à travers le prisme de son harmonie municipale.
Elle se nomme Chauvigny ; on la croit fictive mais un œil sur Wikipédia en rétablit son ancrage terrien, située à une vingtaine de kilomètres de Poitiers.
Par la seule puissance de ses mots, Jean-Pierre Bodin, qui y vécut, la relocalisait hier soir sur la scène du GT (Garage-Théâtre), pierre par pierre, maisons par cafés, bourgs par quartiers.
La ville de Chauvigny revue par JPB est hantée de personnages truculents dont les saillies genre almanach Vermot explosent d’un rire franc le public d’un lieu généralement peu porté aux pantalonnades. C’est égal, ça fait du bien !
Et soudain, ça bascule dans l’irrationnel lorsqu’une fanfare fait irruption côté jardin. Ce diable de Bodin aurait-il réussi à donner chair à la fanfare de Chauvigny par son seul verbe ?
Alors tout se mélangea, réalité, illusion et sous les lampions, dans la chaleur distillée par les petits verres à facettes aux reflets bachiques, nous fûmes projetés chez Fellini, dans Huit et Demi (dont l’auteur Nino est sale car il rota. cf. Jean-Pierre Bodin).