Paul Minthe – 27-03-2021

Texte et photos Patrice Vatan.

Paul Minthe

Un décodeur nommé Paul Minthe.

Comédien de théâtre et à la longue filmographie arrachée au petit et grand écran, Paul Minthe donne l’apparence, au marché de Cosne, d’un petit personnage timide, fragile que cache un masque vert.

Il cherchait l’autre jour la belle librairie qu’on lui avait recommandée. Voulait-il s’assurer que son livre y était, « La Promesse de Samothrace », écrit pour faire barrage au cancer que le flingue du Hasard lui a tiré entre les deux yeux?
Paul y représente son oncologue sous les traits de la déesse ailée, Niké, et la rebaptise Lady Samothrace [1].
Paul Minthe est comme ça, il est passionné par la mythologie, la culture ancienne.

Il fut moniteur de ski à Grenoble, ce qui ne vient pas à l’idée quand on lui cogne le point, mais valut un joli titre de presse à l’homme de théâtre qu’il redevenait le soir : « Des planches aux planches ».

Nous n’étions pas plus nombreux que les doigts d’une main, hier après-midi, à vibrer à l’une des ultimes répétitions d’une pièce très étrange qu’il monte avec « mon metteur en scène personnel, Jean-Yves Ruf » (sourire), intitulée « Vêpres de la vierge bienheureuse », d’un dramaturge italien mort en 2020, Antonio Tarantino – sans lien avec Quentin.

Un drôle de pistolet ce Tarantino, une sorte de clochard céleste à qui on rendait hommage, raconte Paul Minthe, sous les ors de la république des lettres avec ministres et belles dames lorsque surgit une espèce de marginal traînant savate, l’air las, qu’on regardait de très haut et rabrouait presque.
Douce revanche du saute-ruisseau qui montait sur scène sous les vivas qui succédèrent dans la seconde aux moues dédaigneuses.

Du texte des Vêpres… que nous eu entre les mains sourd un sentiment bizarre, comme s’il était la photocopie de son auteur, résistant à la compréhension, abscons, fait d’une écriture superbe, poétique mais une écriture à décoder [2].

Et Paul Minthe est ce décodeur, piloté en wifi théâtral par Jean-Yves Ruf.
Alors Paul Minthe déplie son mètre soixante, se nourrit des fulgurances de Tarantino, gonfle son personnage qui en loge trois : le père, la mère et le fils, un travesti qui s’est suicidé et repose dans l’urne posée sur le banc, seuls accessoires sur une scène dépouillée à l’extrême.

Paul Minthe régurgite ces lignes, nous les envoie lumineuses, sensuelles, évidentes ; le Garage Théâtre s’illumine du Turin populaire des ruelles et des fossés, linge pendu aux fenêtres, on devine Tarantino noircissant du papier à l’arrière cour d’un café mal famé.

[1] https://bit.ly/3flAeVq
[2] https://bit.ly/31sgLKy